Source: zoom-cine.fr |
LA FILLE AU FOULARD VERT
Une fois n’est pas coutume, l’Amérique a lancé une torpille mi-niaise mi-glamour dans le monde du cinéma où la grosse pomme new-yorkaise a encore servi de décor à une histoire vue, revue et corrigée.
Rebecca Bloomwood, ravissante rouquine aux formes superbes, ne peut contrôler ses pulsions de consommatrice acharnée. Elle ne résiste jamais aux boutiques de luxe qui lui font les yeux doux et dégaine sans vergogne ses nombreuses cartes de crédit tel un pistolero mitraillant une armée de mercenaires mexicains. Malheureusement ses achats compulsifs vont plonger ses dettes dans un gouffre vertigineux.
Sa fièvre acheteuse contaminera sa vie privée puis, rapidement harcelée par un agent de recouvrement prêt à tout pour récupérer les œufs d’un panier trop garni, elle utilisera mille et un subterfuges pour fuir une réalité qui la rattrapera tôt ou tard. L’ironie du sort la conduira à devenir journaliste dans un magazine financier afin de combler son découvert phénoménal.
Le producteur Jerry Bruckheimer (Armageddon, Pirates des Caraïbes) a délaissé les héros musclés pour se pencher sur la gente féminine absorbée par des foules volcaniques à l’entrée des magasins, dévorée par l’envie de se jeter sur la moindre étiquette soldée et enfin soulagée par ce moment ultime où elle serre dans son poing l’anse d’un sac Prada ou Gucci. Comme un regard sur la femme moderne rassurée par le sentiment de bien-être après une emplette réussie. J’achète donc je suis.
Ce film, à mi-chemin entre « la revanche d’une blonde » et « le diable s’habille en Prada », ne remplit pas complètement sa mission; celle de nous divertir tout en évoquant un réel problème de société. Le paradoxe de la journaliste qualifiée et empotée manque de crédibilité. Qui peut imaginer Paris Hilton briller dans un magazine financier? A mon humble avis, personne. Concernant les seconds rôles, Kristin Scott Thomas en pâle copie de Meryl Streep, casse un ressort déjà usé et n’apporte rien à l’histoire.
Toutefois, l’actrice principale Isla Fisher est tellement attachante que l’on pardonne ses frasques grotesques et son personnage d’adorable sotte.
Sans tomber dans le mélodrame ou le documentaire télévisé, j’aurais préféré une histoire plus en retenue en traitant en profondeur le malheur des acheteurs compulsifs à travers leur boulimie dépensière. Toute la partie consacrée au journal « Réussir son épargne » n’est qu’une excuse du réalisateur pour glisser des situations farfelues sans grande portée comique. Les séances de thérapie de groupe auraient gagnées à être appuyées dans le but d’apporter une densité humoristique ou caricaturale.
Le film aurait dû nous plonger davantage dans ce monde impitoyable de la consommation à outrance, aux reflets détestables de toutes les vitrines aguicheuses et surtout à ses conséquences désastreuses. Avec une pointe de cynisme et d’objectivité, le spectateur en sortirait plus inspiré.
Cependant, sans croupir dans le cliché abominable de l’avare agrippé à sa précieuse cassette, « confessions d’une accroc du shopping » est une nouvelle soupe lyophilisée dans la gamme des produits néo-romantiques destiné à nous montrer les affres de l’achat à outrance. Mais l’effet inverse se produit car en sortant de la salle obscure, je n’ai eu qu’une envie: dévaliser les boutiques de mon centre commercial et faire chauffer ma carte bancaire.
Hervé Gaudin.